Le panthéon tantrique

Le tantrisme n'est pas une religion. Sans clergé, sans temples, sans autorité suprême, il dispose cependant d'un vaste panthéon intégré sans difficulté au brahmanisme, à l'hindouisme et plus étonnamment au bouddhisme. Il est donc omniprésent même caché. Le linga de Shiva, hindouiste, est ainsi vénéré dans certains temples bouddhistes. Le fonctionnement de ses divinités spécifiques - elles sont innombrables, car les voies tantriques le sont aussi - est le même que celui des religions, avec un grand nombre de divinités vouées à la compassion. Dans le christianisme où les saints sont légions, la plupart agissent dans un domaine particulier généralement lié à une existence réelle, même si elle fut  très enjolivée par Jacques de Voragine.

En Orient les divinités sont les protagonistes de contes qui leur font vivre sur terre des histoires merveilleuses. Pour un esprit rationnel, il ne s'agit que de futilités, mais dans le monde spirituel, la véracité d'un récit, sa réalité n'ont aucune importance. On les imagine, donc ils existent. Ces divinités peuvent porter plusieurs noms, réaliser des choses impossibles, avoir de multiples bras ou un visage d'animal, elles possèdent souvent un même visage et seuls leurs attributs, leurs couleurs, leurs attitudes permettent de les individualiser. Elles sont toutes vouées à disparaître un jour lointain, et ne sont jamais le but vers lequel se dirige le pratiquant. Elles n'existent que pour l'aider dans son cheminement. Aucune image ne renvoie donc à un être ayant réellement existé selon les critères occidentaux, mais là encore, en occident ce fut la même chose dans la représentations des saints du monde byzantin.

Ci-dessus, Shiva qualifié dans cette représentation de Nataraja, est vénéré dans l'hindouisme et le tantrisme (ils ne s'excluent pas). Il danse la fin et la création du monde ; elles se succèdent sans fin dans des cycles cosmiques matérialisés ici par les flammes extérieures. C'est la danse de la vie et de la mort qui sont indissociables. Chaque grande divinité possède une forme masculine et une forme féminine qui s'unissent dans le yab-yum (Elle est assise sur Lui) pudiquement caché aujourd'hui dans les sanctuaires par des étoffes enroulées. Ci-dessous Shiva et Shakti - sa parèdre - vivent cette union parfaite, à la fois physique et spirituelle qui échappe au mouvement perpétuel et aux cycles des réincarnations. Dépassant la dualité, ils ont atteint la plénitude, la paix parfaite, abolissant le passé comme le futur.